Lors du débat
consacré à « l’accueil des réfugiés en France et en Europe », hier à
l’Assemblée nationale, Manuel Valls a une fois de plus illustré son goût
(ou celui des rédacteurs de ses discours) pour les petites phrases. Parmi ses
formules bien trempées, une a particulièrement retenu l’attention de la
presse : « il faut du cœur, bien sûr, mais un cœur intelligent, un
cœur ferme et un cœur lucide ».
Cette formule, pourtant, ne dit rien d’autre que :
« il faut du sentiment et de la raison », ce qui paraît être un
minimum de la part d’un chef de gouvernement. Mais elle possède la force
mystérieuse des répétitions internes, fameusement illustrée par Danton : « De
l’audace, encore de l’audace, toujours de l’audace ! » Elle a
aussi l’avantage de pouvoir être reprise aussi bien par les partisans du
sentiment que par ceux de la raison : chacun pourra placer le curseur à sa
guise entre le cœur d’une part, l’intelligence, la fermeté et la lucidité de l’autre.
Les mains du Premier ministre soulignent cette recherche
d’équilibre et de neutralité. Parlant au perchoir, il veille à les garder à plat sur le pupitre.
Un peu plus tard dans la même séance, échauffé par le débat, il reviendra à une
gestuelle qui exprime sans doute mieux sa personnalité, braquant l’index droit
alternativement vers le ciel et vers ses interlocuteurs.
Michel Le Séac'h
Photos : copies partielles d’écran, vidéo de l’Assemblée
nationale, séance du 16 septembre 2015 à 1:27:02 et 3:47:54