- La petite phrase n’est pas nécessairement une phrase au sens grammatical : c’est une « formule », c’est-à-dire une expression condensée, nette et frappante. Elle se suffit à elle-même. Pour des sciences comme les mathématiques, une formule exprime de manière symbolique une règle opératoire. Et en réalité, telle est bien la mission de la petite phrase : elle rappelle de manière implicite ce qu’il faut faire ou penser dans certaines circonstances.
- La petite phrase n’est pas seulement petite, c’est-à-dire brève, composée de peu de mots, elle est « concise », un adjectif que l’Académie définit ainsi : « Qui fait entendre beaucoup de choses en peu de mots ». La petite phrase contient davantage qu’elle-même.
- La petite phrase se présente « sous des dehors anodins ». L'Académie donne du volume à la petite phrase : puisqu'il y a « dehors », implicitement, il y a aussi « dedans ». Ces dehors sont « anodins », adjectif issu du grec qui signifie aujourd'hui « sans importance ». L'important se cache à l'intérieur de la petite phrase.
- La petite phrase est animée d’une intention. Elle « vise ». Notez-le bien : dans la définition de l’Académie française, le sujet du verbe d’action est la petite phrase elle-même. Celle-ci n’est pas la simple expression de son auteur, elle est animée d’une vie propre. De fait, beaucoup de petites phrases prennent leur essor de leur propre chef, au grand dam leur auteur parfois. Ou bien, elles atteignent d'autres cibles que celles qu'on visait (voyez la couverture du livre ci-contre : deux des flèches ont atteint la cible sans avoir été tirées directement vers elle !).
- Le but de la petite phrase est de « marquer », c’est-à-dire de produire une impression durable – même si une marque est en général appelée à s’estomper plus ou moins vite. Elle relève plus de la mémoire que de l'intelligence, son but n’est pas de convaincre ou d’alimenter un raisonnement.
- La marque laissée par la petite phrase porte sur « les esprits ». Si le nom « esprit » peut avoir de nombreuses significations, on note en tout cas que le pluriel employé par l’Académie française dénote le caractère collectif de la petite phrase : elle s’adresse en général à un groupe, non à une personne.
Michel Le Séac'h
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