Emmanuel Macron, en visite au Danemark, a rendu hommage hier
à son « peuple luthérien qui n’est pas exactement le Gaulois
réfractaire au changement ». Ce « Gaulois réfractaire
au changement » a aussitôt été isolé du discours pour être commenté séparément.
De nombreux médias ont sans détour qualifié la formule de
petite phrase, à l’instar de LCI,
RTL,
Le
JDD, France
Culture, etc. Dans la foulée, beaucoup d’autres, reprenant une dépêche de
l’AFP, surenchérissent en évoquant « une sortie qui rappelle sa petite
phrase de l’été 2017 sur les
Français qui "détestent les réformes" ». Cet effet
performatif (si les médias disent que c’est une petite phrase, alors c’en est
une) est confirmé par un grand nombre de commentaires dans les médias sociaux
et les forums en ligne (260 commentaires de lecteurs sur le site de 20
minutes le 30 à 11h00, par exemple).
Si l’on veut un indicateur synthétique de l’attention portée
par l’opinion publique à cette phrase, voici le score des recherches sur le terme « gaulois » au cours des sept derniers jours selon Google Trends. Il est
clair que quelque chose s’est passé le 29 août !
« Le Gaulois réfractaire au changement » ne
se présentait pas comme une formule détachable. C’était une proposition
subordonnée d’une phrase élogieuse consacrée aux Danois. Peut-on y voir pour
autant une formule innocente ? Elle dénoterait à tout le moins un grand
manque d’empathie : quel peuple apprécierait que son dirigeant aille dire
du mal de lui à des étrangers ? Car il ne faisait aucun doute dans le
contexte que « réfractaire au changement » n’était pas un
compliment !
Emmanuel Macron est réputé apprendre vite. Il a déjà une
riche expérience des petites phrases malheureuses, des « illettrés »
au « pognon
dingue » en passant par les « kwassa-kwassa » ou
la « vie
plus dure des entrepreneurs ». Il sait bien que si, en France, il peut souvent
échapper à la presse, qu’il n’aime pas, il est forcément exposé à
l’étranger. Il est donc difficile de croire que sa formule ait été une pure
étourderie. Il est possible en revanche qu’elle ait été une imprudence notoire.
Michel Le Séac'h
Photo : copie d'écran LCI