Comment se planter ? Renaud Czarnes prend le contrepied
de la plupart des experts dans ce petit livre paru cette année aux éditions
Kawa : il explique ce qu’il ne faut pas faire en communication
politique. Sa principale expérience opérationnelle en la matière est brève,
deux ans aux côtés du premier ministre Jean-Marc Ayrault, mais on sent qu’elle
a été riche d’enseignements amers ! Cependant, si ces deux années ont pu
lui paraître longues, elles n’ont pas suffi à faire de lui un homme du
sérail : il garde une distance et une faculté d’étonnement salutaires à
l’égard de son sujet.
Il distingue quinze règles pour échouer infailliblement :
Il distingue quinze règles pour échouer infailliblement :
- Ne pas oublier que les médias sont des entreprises comme les autres
- Ne pas confondre l’info, le « tout info » et le « non info »
- Croire que la France vit au rythme de BFM !
- Essayer de se faire entendre quand tout le monde parle en même temps
- Croire qu’on peut éviter les « couacs » au sein d’un gouvernement
- Petite alerte ou début de crise : comment savoir si agir n’est pas pire que de ne rien faire ?
- Ignorer les fondamentaux de la communication de crise
- Oublier que la vérité n’est pas toujours audible
- Espérer gagner du temps avec les comités Théodule et les rapports en tous genres
- Croire aux sondages… ou le contraire
- Croire que le « off » existe encore… ou le contraire !
- Croire que les « fuites » dans la presse sont spécifiquement dirigées contre vous
- Croire que « le message, c’est le medium » (et se demander « où parler et pour dire quoi » ?)
- Oublier qu’il ne faut pas « insulter l’avenir »
- Croire encore à la « sacralisation de la fonction présidentielle »
La liste est-elle complète ? Peut-être aurait-il fallu
y ajouter un rappel d’un principe énoncé jadis par Marcel
Bleustein-Blanchet : Oublier que si la communication d’un bon produit est
de l’information, celle d’un mauvais produit est de la diffamation. Mais Renaud
Czarnes est sans doute trop gentil pour le dire. Ou peut-être a-t-il bien
intégré sa 14e règle ci-dessus ?
Les petites phrases font quelques apparitions dans ce livre.
Le seul adjectif que Czarnes leur applique est « assassines »
(p. 60). Pourtant, étudiant celles d’Emmanuel Macron, il note qu’elles « ont
sans doute pour objectif de construire une personnalité populaire, sincère et
authentique », un oxymore qui surprend évidemment : comment une
personnalité « construite » serait-elle en même temps sincère et
authentique ? L’assassin avance masqué !
Ses petites phrases, note l’auteur, Emmanuel Macron « devrait
les garder pour un dîner entre amis plutôt qu’en public » (p. 74). Ce
qui est plus facile à dire qu’à faire : les Français sont en attente d’une
parole présidentielle, admet Czarnes en citant Jacques Pilhan. Le silence n’est
pas une stratégie. Le risque d’une parole mal interprétée est donc permanent.
Michel Le Séac’h
Renaud Czarnes, Anti-manuel de communication politique –
Vade-mecum à l’usage des femmes et des hommes politiques ainsi qu’à ceux qui
les conseillent, Bluffy, Éditions
Kawa, 2019, 90 pages, 19,90 euros.
www.editions-kawa.com
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