Ouest-France a publié hier un article de réflexion intitulé « Stop aux petites phrases assassines ». Les petites phrases n’ont pas bonne presse, mais faut-il que le danger soit majeur pour que le premier quotidien français par sa diffusion leur consacre un quart de sa page 5…
En réalité, l’auteur de l’article ne songeait pas du tout au débat politique, lieu habituel des petites phrases « assassines » (deuxième adjectif le plus souvent appliqué aux petites phrases). Docteur en sciences de gestion, professeur agrégée dans un institut d’administration des entreprises, Isabelle Barth se préoccupe de petites phrases comme « Tu es méchant ! » ou « Tu ne sais rien faire ! » adressées à des enfants. Elles « étouffent à bas bruit » leur destinataire « comme les gouttes d’eau qui remplissent peu à peu le vase, saturent l’espace vital de celui ou celle qui les subit ».
Image générée par Dall-E, d'OpenAI, sur le thème « politicien prononçant une petite phrase assassine » |
Bien qu’inapproprié ici, l’adjectif « assassine » souligne néanmoins la puissance énorme de certaines phrases. Or la puissance d’une phrase aussi banale que « Tu es méchant ! » n’est pas dans ces trois mots eux-mêmes, il est dans l’univers de sous-entendus auquel ils renvoient. Un univers fait principalement des relations entre le locuteur et le destinataire de la phrase. Ce dernier, l’assassiné métaphorique, réagit à ce qu’on lui dit selon ses propres affects et l’idée qu’il se fait du locuteur. Ainsi, la petite phrase est une micro-rhétorique qui réalise l’unité du logos, du pathos et de l’ethos. Et au fond, ce n’est pas si différent dans le débat politique, mis à part le fait qu’une petite phrase s’adresse à un public entier et non à un seul auditeur.
M.L.S.
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