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04 décembre 2018

Gilets jaunes et petites phrases

Rarement un mouvement politique ou social a suscité autant de commentaires en tous genres que celui des « gilets jaunes ». Un seul point paraît à peu près consensuel : les causes du mouvement ne se bornent pas à l’augmentation du prix des carburants. Parmi toutes les causes envisageables, les petites phrases tiennent une place de choix.


Les petites phrases de Christophe Castaner, de Gérald Darmanin ou de Benjamin Griveaux, mais surtout celles d’Emmanuel Macron. « 80 % du bordel des "gilets jaunes" est le résultat des petites phrases du chef de l’État depuis six mois », estime même, sous couvert d’anonymat, un député LaREM cité par Mathilde Siraud dans Le Figaro du 3 décembre. Les quatre cinquièmes du bordel ! Déclaration que BFM TV commente ainsi : « Cette idée que la contestation dans la rue se cristallise autour de la personnalité du président de la République fait désormais le sel de l'opposition. »  Autrement dit, on connaît la personnalité du président de la République à travers ses petites phrases.

Le professeur Arnaud Mercier rejoint en grande partie cet avis dans une étude publiée le 3 décembre par The Conversation et reprise par franceinfo et La Tribune. Selon lui, Emmanuel Macron a rompu le fil de la confiance « en multipliant depuis son élection, les petites phrases assassines à destination des Français qui ont été prises comme autant de marques d'humiliation à l'égard de ceux qui sont en galère, au profit des "premiers de cordée" ».

On note l’adjectif « assassines », marque d’une grande violence. Il s’applique à ces formules, expressément citées : « Je traverse la rue, je vous trouve du travail », « Des Gaulois réfractaires au changement », « On met un pognon de dingue dans les minimas sociaux », « Les gens qui ne sont rien ». Assassines, ces petites phrases ? Au premier degré, elles évoquent plutôt des « brèves de comptoir ». Pourtant, elles ont contribué à mettre des centaines de milliers de gens dans la rue et sur les ronds-points. C’est donc qu’elles contiennent un second degré très puissant.

Un second degré qui n’est certainement pas dans l’intention du président de la République mais dans l’interprétation qu’en font les Français. La petite phrase appartient davantage à celui qui la reçoit qu’à celui qui la prononce.

Michel Le Séac’h